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Guerre en Ukraine : Un front affaibli par les désertions et le manque d’armement – l’armée de Kiev peut-elle encore tenir ?

Dernière mise à jour : 30 oct. 2024



Une crise de désertions en pleine escalade

À mesure que la guerre en Ukraine s’intensifie, l’armée de Kiev fait face à une situation critique : un nombre alarmant de désertions. Le 8 octobre, un chiffre révélateur a frappé les esprits – en seulement huit mois de 2024, plus de 15 500 soldats ukrainiens ont quitté leurs rangs, l’équivalent de cinq brigades. Depuis 2022, cette hémorragie ne cesse d’enfler : 3 342 désertions la première année, 7 883 l’année suivante. Si l’on compte les abandons non autorisés d’unité, c’est au total plus de 45 000 hommes qui font défaut à l’armée de Kiev, soit environ quinze brigades manquantes. Pour les experts militaires, cette perte humaine fragilise gravement la défense ukrainienne, au moment même où les forces russes grignotent du terrain à l’Est. Le général (2S) Jean-Paul Perruche, ancien directeur de l’état-major de l’Union européenne, s’interroge sur la capacité de l’armée ukrainienne à stabiliser ses lignes sans se faire enfoncer par l’armée russe.

L’effondrement d’une mobilisation limitée par la conscription et la corruption

Malgré un patriotisme exalté au début de l’invasion, l’armée de Kiev peine à recruter et surtout à retenir ses troupes. En abaissement l’âge de mobilisation de 27 à 25 ans, l’Ukraine espérait réunir 200 000 hommes par an, bien en deçà des 360 000 que la Russie peut mobiliser annuellement. Mais ces chiffres restent théoriques : un système de conscription d’héritage soviétique et des pratiques de corruption généralisée permettent aux réfractaires d’acheter leur exemption, une faille que le président Zelensky a récemment tenté de colmater.

De plus, l’euphorie des premières victoires et la fierté de résister ont peu à peu laissé place à une profonde désillusion. Le manque de relève en première ligne, aggravé par la rareté des armes et des munitions, érode la morale des troupes. "La démoralisation des soldats et leur refus de ‘mourir pour rien’ devient palpable", estime Perruche, traduisant ainsi une lassitude générale au sein des rangs.


Une armée privée de moyens : un cercle vicieux entre hommes et matériel

Une armée repose sur trois piliers fondamentaux : des soldats bien formés et motivés, des matériels diversifiés, et une logistique efficace. Or, l’Ukraine souffre d’un déséquilibre permanent entre ces trois éléments, comme l’explique l’ingénieur militaire Marc Chassillan. Les troupes, parfois en nombre mais non équipées, se retrouvent bloquées, tandis que des matériels envoyés par les alliés sont inutilisables faute d’hommes qualifiés pour les manipuler.

L’armée ukrainienne est donc en constante infériorité numérique et matérielle. "Les Russes disposent d’un réservoir de soldats bien plus important, alors que les Ukrainiens sont limités et n’ont pas les ressources suffisantes pour rivaliser en termes de logistique et de maintenance", souligne Perruche. La conscription reste un défi, mais au-delà, l’Ukraine manque également de matériel de pointe pour compenser cette infériorité.




La pénurie d’armes et de munitions s’aggrave

Sur le plan matériel, les engagements internationaux ont souvent pris la forme de promesses plutôt que de livraisons effectives. Si l’Ukraine a reçu quelques centaines de véhicules blindés, les armes promises, comme les chars Leopard, se font toujours attendre. En théorie, les stocks européens comptaient 2 000 chars, mais, par prudence ou pour préserver leurs propres forces, plusieurs nations frontalières de la Russie, comme la Pologne, ont préféré garder ces équipements.

Au final, l’Ukraine n’a reçu que 130 chars Leopard, dont 40 ont déjà été détruits. Et ces chiffres ne s’appliquent pas qu’aux chars : l’approvisionnement en autres équipements est également défaillant, laissant les forces ukrainiennes constamment sous-équipées pour mener une défense efficace.


La stratégie de survie : miser sur la technologie pour compenser les pertes

Face à ce défi grandissant, une seule option semble offrir un espoir de maintenir une résistance viable : recourir à une technologie militaire plus avancée. Les experts militaires considèrent qu’il est crucial pour l’Ukraine d’obtenir des armes performantes, capables de frapper les lignes arrière russes, là où les renforts se regroupent. Le général Perruche avertit que, sans cette aide technologique, l’Ukraine pourrait non seulement perdre du terrain, mais entraîner dans sa chute l’ensemble du bloc occidental qui la soutient.

Alors que les alliés se concentrent sur la fabrication et la livraison de nouveaux matériels, les délais de production – entre 18 et 24 mois – constituent un obstacle majeur pour répondre aux besoins immédiats de Kiev. Chaque jour qui passe accentue la fragilité de l’armée ukrainienne, tant en ressources humaines qu’en équipements.


Une guerre d’endurance qui épuise les forces ukrainiennes

L’armée de Kiev se bat contre le temps, tentant de combler un fossé grandissant entre ses moyens humains et matériels. La mobilisation continue de se heurter à des contraintes internes, tandis que les soutiens internationaux, bien que solidaires, peinent à compenser le manque d’équipements cruciaux. Les forces ukrainiennes, épuisées et sous-armées, résistent par bravoure, mais la question reste : combien de temps peuvent-elles encore tenir face à une armée russe supérieure en nombre et en logistique ?

La réponse pourrait bien se trouver dans la capacité des alliés à accélérer leur soutien technologique et matériel. Car, sans une aide concrète et rapide, les espoirs de Kiev pourraient bien s’effriter, et avec eux, ceux de tout un peuple en quête de liberté.

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