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Logements sociaux : les HLM seront-ils réservés aux français après la dissolution de l'assemblée nationale ?



Le Rassemblement National (RN) a frappé fort aux élections européennes, remportant une large victoire avec 31,5% des voix. Dans la foulée, le parti d'extrême droite avance une proposition phare : réserver l'accès aux habitations à loyer modéré (HLM) aux familles françaises. Cette idée, portée par le président du RN, Jordan Bardella, s'accompagne d'une autre mesure choc : exclure les repris de justice des logements sociaux. Mais cette ambition est-elle juridiquement faisable ? C’est la question qui se pose alors que le président Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin.

Plongeons dans un scénario de politique fiction. Pour que le RN puisse mettre en œuvre son programme, il devrait d’abord remporter les élections législatives des 30 juin et 7 juillet, devenant ainsi majoritaire à l’Assemblée nationale. Jordan Bardella serait alors propulsé à Matignon, et les cadres du parti nationaliste pourraient entrer au gouvernement. Mais même avec ces conditions réunies, réserver l’accès des HLM aux familles françaises reste très compliqué. Selon Philippe Blachèr, professeur agrégé de droit constitutionnel à l’Université Lyon-II-Lumière, une telle mesure se heurterait à la constitutionnalité.



Le principe d’égalité, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel, interdit toute discrimination fondée sur la nationalité. « La loi prônée par le RN pourrait être juridiquement adoptée mais elle serait bloquée par le Conseil constitutionnel », explique Blachèr. En effet, deux décisions du Conseil constitutionnel vont dans ce sens. En 1990, les Sages avaient jugé qu’exclure les étrangers des prestations sociales n'était pas possible au nom de l’égalité. De même, en 2011, ils avaient déclaré contraire au principe d’égalité une loi réservant des aides au logement aux anciens combattants en fonction de leur nationalité. De plus, l’article 225-1 du Code pénal stipule que « toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine constitue une discrimination ». Impossible donc, selon le droit, de réserver les aides au logement sur des critères de nationalité.




Mais ce n’est pas tout. Le RN souhaite aussi expulser les délinquants des logements sociaux, une mesure qui soulève également des objections juridiques. « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement une seconde fois à raison des mêmes faits, c’est un grand principe du droit français », rappelle Philippe Blachèr. En d'autres termes, une personne ne peut pas être expulsée d’un HLM en raison de son casier judiciaire. Les procédures d’expulsion sont strictement encadrées par la loi et ne peuvent être engagées que pour des motifs précis, tels que le non-paiement du loyer, la dégradation du logement ou des troubles anormaux du voisinage.

Ainsi, même si le RN devenait majoritaire au Parlement, ses propositions phares en matière de logement se heurteraient à des obstacles juridiques importants. La Constitution et les lois françaises actuelles interdisent toute discrimination basée sur la nationalité ou les antécédents judiciaires en matière d’accès aux logements sociaux. Le débat sur la réforme des HLM risque donc de rester très théorique, face aux principes d’égalité et de justice qui sont au cœur du droit français.


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