top of page

La Russie et sa Flotte Fantôme : L’Art de Contourner les Sanctions Occidentales



Une Nouvelle Stratégie dans la Guerre Économique

Depuis le début de la guerre en Ukraine, les équilibres économiques mondiaux ont été profondément bouleversés. La Russie, acteur majeur de ce conflit, se retrouve face à une cascade de sanctions imposées par les pays occidentaux. Pour maintenir ses revenus énergétiques, Moscou a développé une stratégie de contournement audacieuse : une "flotte fantôme". D’abord utilisée pour le pétrole, cette technique semble désormais s’étendre au Gaz Naturel Liquéfié (GNL).


La Fin d’une Époque pour le Gaz Russe

Historiquement, la Russie a largement profité de ses vastes réserves de gaz et de pétrole pour financer son économie. L’Europe, autrefois dépendante du gaz russe, a réduit cette consommation de manière drastique, passant de 40 % en 2021 à seulement 7 à 8 % en 2023. La perte colossale de 6,4 milliards d’euros annoncée par Gazprom en mai 2024 en est la preuve éclatante. Malgré les prévisions optimistes des analystes, la réalité financière est impitoyable pour l’entreprise russe.


La Flotte Noire : Une Réussite pour le Pétrole

Face aux sanctions, la Russie a innové en déployant une "flotte noire" pour son pétrole. Ces pétroliers, souvent vieillissants et sans assurance, naviguent sous des pavillons de complaisance. Selon l'Atlantic Council, cette flotte compterait environ 1 400 navires, et représenterait 12 % de la flotte mondiale selon la Lloyd’s List. Ces bateaux permettent à la Russie de vendre son pétrole au-delà des prix imposés par les sanctions, maintenant ainsi un flux financier vital pour Moscou.


Du Pétrole au GNL : Une Transition Stratégique

La stratégie de la flotte fantôme ne se limite plus au pétrole. Bloomberg a récemment révélé que la Russie pourrait utiliser une méthode similaire pour le transport du GNL. Des navires de classe glace, capables de naviguer dans les eaux glacées de l’Arctique, ont été transférés à des entreprises obscures basées à Dubaï. Ces navires sont essentiels pour transporter le GNL depuis les complexes russes de Yamal LNG et Arctic LNG 2.




Des Indices Accablants

Il est rare que des acteurs inconnus se procurent des transporteurs spécialisés valant des centaines de millions de dollars, souligne Bloomberg. Les assureurs de plusieurs de ces navires sont également répertoriés comme "inconnus", une caractéristique commune aux navires de la flotte noire. Bien que les connexions directes avec de grandes entités russes restent à prouver, les incohérences relevées pointent vers une nouvelle flotte fantôme dédiée au GNL.


Sanctions et Contournement : Un Jeu d’Échecs Logistique

Le timing de cette nouvelle stratégie est particulièrement intéressant. En juin 2024, l'Union européenne a imposé des sanctions sur le GNL russe, interdisant le transbordement dans les ports européens. Cela complique la logistique pour la Russie, qui dépendait de ces escales pour transférer le GNL des brise-glaces aux navires-citernes conventionnels. Le transbordement en pleine mer n’étant pas une option viable pour le GNL, la Russie doit trouver des solutions créatives.


Les Conséquences Mondiales

Les données de suivi des navires montrent que jusqu’à huit cargaisons russes sont transbordées en Europe certains mois. En 2023, 22 % de ces approvisionnements ont été réacheminés dans le monde entier, dont 8 % vers d'autres États membres de l’UE, le reste étant destiné à la Chine, l’Inde, la Turquie et d’autres pays. Si les soupçons sur la nouvelle flotte fantôme russe se confirment, Moscou aurait démontré une fois de plus sa capacité à déjouer les sanctions occidentales, un défi supplémentaire pour les alliés de Kiev.


La Russie montre une résilience et une inventivité redoutables face aux sanctions occidentales. En étendant sa flotte fantôme au transport du GNL, Moscou pourrait continuer à financer son économie et sa guerre en Ukraine malgré les efforts internationaux pour l'isoler. Cette nouvelle manœuvre, si elle est avérée, serait une preuve supplémentaire de l’habileté russe à contourner les obstacles économiques, rappelant au monde que la guerre économique est loin d'être gagnée.

Comments


bottom of page